SFR : Michel Combes va-t-il favoriser la data facturée en fonction de la qualité de service ?

Analyse : Le nouveau p-dg de SFR est connu pour ses idées novatrices mais également radicales. L'objectif est simple : remettre SFR sur les rails dans un contexte concurrentiel beaucoup plus dur.

Par Olivier Chicheportiche

  • 3 min

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La nomination de Michel Combes à la tête de SFR en remplacement de Frank Esser est saluée par les observateurs. Son poste de directeur général de Vodafone Europe (ancien actionnaire de SFR) et son expérience chez France Télécom en font un expert reconnu.

« Il connaît très bien le marché français tout en ayant une très forte expérience internationale avec Vodafone », commente Emeka Obiodu, analyste pour OVUM. »Ces atouts seront essentiels au moment où SFR subit une énorme pression de la part de Free Mobile et des acteurs ‘over the top' ».

Mais c’est surtout pour sa capacité à faire bouger les lignes, notamment dans le mobile, que Michel Combes est attendu. L’homme de 50 ans n’a en effet pas sa langue dans sa poche et il est probable qu’il applique à la lettre des solutions radicales qui visent à transformer le modèle économique de SFR.

« La données est l’avenir de notre industrie »

L’opérateur subit comme ses concurrents la vague Free Mobile avec 200 000 clients perdus en moins de deux mois et des perspectives financières difficiles. Outre une restructuration assez probable (SFR a prévu de lancer un vaste plan d’économies de l’ordre d’un demi-milliard), à l’image de ce qu’il a réalisé chez France Télécom avec le plan Next, Michel Combes devrait mettre en place d’importants changements structurels.

On connaît d’ailleurs déjà un peu ses idées. Il s’agira en premier lieu de valoriser la data, qui constitue aujourd’hui le point d’entrée des consommateurs lorsqu’ils choisissent un forfait.

Problème, si la data représente désormais 80% du trafic, il génère seulement 20% des revenus (contre 80% pour la voix qui génère donc 20% du trafic). Dans le même temps, SFR comme ses petits camarades doit maintenir ses investissements dans les réseaux tout en subissant une baisse de son chiffre d’affaires générée par le nouveau contexte concurrentiel.

Pour Michel Combes, il n’y a pas 36 solutions pour résoudre cette équation. « La donnée c’est l’avenir de notre industrie, son prix doit refléter les investissements dans le réseau et le spectre », expliquait-il il y a quelques mois de la conférence annuelle de l’Idate.

Traduction : les plans de facturation différenciés vont devenir la norme. Elles ne reposeront pas seulement sur le volume mais surtout sur la qualité de service, l’expérience client, les services.

Il y a donc fort à parier que le nouveau p-dg applique un modèle déjà testé en Europe avec des forfaits basiques qui ne permettront que de surfer ou de relever ses mails et des forfaits plus onéreux qui donneront accès à la vidéo et à la musique en streaming, et à une garantie de vitesse aux heures de pointe. Tant pis pour la Neutralité du Net.

Autre cheval de bataille de Michel Combes, la concurrence jugée déloyale des géants du Web. Il faut dire que les opérateurs comme SFR perdent la main sur les domaines à forte valeur ajoutée qu’ils contrôlaient jalousement depuis des années : les plates-formes (de facturation par exemple avec iTunes ou logicielles avec iOS et Android), et les services (Skype, Viber, What’s App et les autres).

Pression sur le régulateur

« Apple et Google exercent un contrôle de plus en plus fort de la chaîne de valeurs, ils équiperont 60 à 80% des smartphones en circulation en 2015″, lançait le responsable lors de la même conférence.

« Le danger, qu’ils priorisent, qu’ils créent de nouveaux modèles économiques et commerciaux captifs qui viendront assécher la capacité d’investissements des opérateurs. Or, sans réseaux, les smartphones sont de jolis presse-papier », poursuit-il.

Comment réagir à cette tendance ? Michel Combes ne manquera pas de faire pression sur l’Arcep. « Aux régulateurs d’être aussi attentifs au respect de la concurrence et aux menaces de concentration pour les acteurs du Web que pour nous ! », tonne-t-il.

L’offensive risque de s’apparenter à un coup d’épée dans l’eau. Tout comme l’initiative WAC, sorte de portail commun multi-opérateurs et fabricants, interopérable et censé concurrencer les magasins d’applications des Apple et autres Google.

Annoncé il y a presque deux ans, WAC (pour Wholesale Applications Community) tarde à devenir une réalité. Pourtant Michel Combes y croît. « Nous apportons l’interopérabilité entre les OS, c’est une valeur ajoutée pour l’utilisateur », avance-t-il.

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AUTOUR DE ZDNET
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