Le BlackBerry en sursis

Télécoms : Aux Etats-Unis, dans l'affaire opposant NTP et RIM, le tribunal a reporté son jugement final à une date ultérieure. Le tsunami technologique attendu n'a donc pas eu lieu. Résumé des évènements.

Par Benoit Darcy

  • 3 min

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On s’attendait au pire. Une interruption totale du service. Des terminaux BlackBerry devenus muets et inutiles sur fond de débâcle boursière. Rien de tout cela n’est arrivé. Et pourtant, la séance a bien eu lieu vendredi 24 février au tribunal de Richmond en Virginie. James Spencer, juge en charge de l’affaire, a commencé par rappeler qu’une décision de justice avait déjà été rendue en faveur de NTP et qu’il faudra en tenir compte. Dans un second temps, Spencer, manifestement lassé de cette histoire, n’a pas pu cacher son étonnement face à la nature du différend. Là où d’autres sociétés se seraient arrangées « à l’amiable », hors tribunaux, RIM et NTP s’entêtent à régler leur litige devant les tribunaux souligne le juge. Une attitude plus incompréhensible encore puisque RIM a mis au point un procédé lui permettant de s’affranchir totalement des brevets mis en cause par NTP et, par ricochet, des accusions. Une stratégie de contournement qui, selon les dires du co-président de la firme canadienne, Jim Balsillie, ne provoquerait même pas d’interruption momentanée du service…

Pour autant, cette interruption se situe au centre de la défense du canadien. Lors de l’audience de vendredi, lorsque les avocats de NTP confirment leur volonté de faire cesser le service de messagerie mobile BlackBerry, ceux de RIM mettent l’accent sur les conséquences qu’une telle décision pourrait avoir dans le fonctionnement des administrations, les grandes entreprises, en un mot, sur l’économie américaine toute entière.

La parole à la défense

Une argumentation qui a visiblement fait mouche auprès du juge Spencer puisque d’une part celui-ci n’a pas ordonné l’interruption du service et que d’autre part il a repoussé sa décision finale à une date ultérieure, estimant qu’il était trop tôt pour se prononcer sur cette affaire. Le message s’avère on ne peut plus limpide: la justice américaine laisse une dernière chance aux deux sociétés de trouver un arrangement à l’amiable… C’est d’ailleurs ce qu’a confirmé Martin Glick, un avocat de RIM, qui confiait vendredi à nos confères américains de CNET News.com que « la société mène encore activement des négociations avec NTP ». De son côté NTP communique auprès de « tous les utilisateurs de BlackBerry« . Pour faire simple, le BlackBerry n’est donc pas mort, mais la procédure n’est pas terminée…

L’incroyable succès

Avec près de 4 millions de clients, dont 3 rien qu’aux Etats-Unis, le BlackBerry constitue à ce jour l’assistant personnel le plus vendu au monde. Nul doute que les enjeux sont considérables. Balsillie a ainsi déclaré vendredi que la totalité des brevets revendiqués par NTP avaient été invalidés par l’office américain des brevets (USPTO). Il a également ajouté que l’office avait rejeté les plaintes de NTP qu’il lui restait à traiter. Dans un communiqué de presse officiel, RIM souligne que « ces rejets reflètent l’opinion finale des experts de l’USPTO, bien que NTP ait encore la possibilité de faire appel« . Une procédure d’appel, qui, selon de nombreux spécialistes, prendrait plusieurs années…

Pourquoi aller si loin ?

Force est de constater que cette affaire aurait pu trouver une issue plus souple depuis longtemps. Alors, pourquoi aller si loin ? Quel peut bien être le mobile d’un tel entêtement. Idéologique, intellectuel ? Voilà qui est peu probable. Le monde des affaires ne laisse pas beaucoup de place à l’honneur et aux nobles sentiments… C’est peut être du côté du Nasdaq qu’il faut aller chercher une réponse. Depuis janvier 2003 le cours de l’action RIM n’a cessé d’augmenter, et ce jusque fin 2005. Vendredi, à la clôture, le cours avait bondi de près de 8,5 %…

Mais au delà des spéculations boursières, il y a un mobile bien plus lucratif à moyen terme. En effet, depuis la sortie du terminal BlackBerry 8700 en novembre 2005, il ne se passe pas une semaine sans que RIM n’occupe les titres des médias, spécialisés ou non. Si l’on ne peut raisonnablement pas parler d’opération publicitaire organisée, il faut reconnaître que cette affaire, quelque soit son issue – et les chances en faveur d’un arrêt du service sont faibles – aura largement contribué à populariser la solution de messagerie mobile. RIM n’a d’ailleurs pas attendu la décision finale du tribunal pour lancer son terminal en Europe ou en Australie…

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AUTOUR DE ZDNET
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